Nathalie Somville

Diététicienne Nutritionniste

Peut-on "apprivoiser" son appétence pour les aliments gras et sucrés?

Si, plusieurs fois par semaine (ou même par jour), vous ressentez un besoin irrésistible de manger plus que raison des « doudous gustatifs », c’est à dire des produits sucrés, il est temps de réagir !

Faisons tout d’abord un petit point sur cette simili addiction aux produits sucrés . Qui n’en est pas vraiment une, car :

Il est important de relativiser de nombreux travaux très médiatisés qui semblent démontrer que, chez le rongeur, le sucre est plus addictif que la cocaïne.

Parmi ceux-ci, une longue série d’expériences réalisées par Magalie Lenoir, Fushia Serre et Lauriane Cantin semble être à l’origine de l’idée que le sucre aurait un pouvoir addictif supérieur à celui de la cocaïne (1).

Dans ce expériences, des rats avaient le choix entre une boisson sucrée et des doses croissantes de cocaïne. 94% préféraient largement le goût sucré à la cocaïne.

Or on parle d’addiction pour des substances non indispensables à la santé voire nocives, même consommées en petite quantité : tabac, drogue…

Notre cerveau consomme à lui seul l’équivalent d’un morceau de sucre à l’heure, une personne adulte totalement sédentaire a besoin de 150 g minimum de glucose pour subvenir aux besoins en énergie de son organisme.

D’où cette attirance naturelle pour le sucré, question de survie également !

Par contre ce vieux réflexe n’est plus du tout adapté dans un environnement où la carence en glucides n’est plus à craindre, mais l’excès, oui.

Surtout que notre corps sait fabriquer du glucose à partir d’acides aminés en cas de besoin ou d’excès de protéines (néoglucogénèse), toujours ce bon vieux réflexe de survie !

-De manière innée, nous sommes tous attirés par le goût sucré. Dans les temps très reculés, cette préférence primitive pour le sucré permettait à l’être humain d’orienter ses choix alimentaires. 

En effet, l’attirance pour le goût sucré permet à tout bébé d’accepter le lait maternel et de refuser des substances amères ou acides, potentiellement toxiques (dans la nature, l’amer est souvent associé à la toxicité). 

Enfin, de manière physiologique, l’absorption d’aliments sucrés favorise la sécrétion d’hormones du plaisir, comme la sérotonine. Et, bien entendu, une fois cet état plaisant expérimenté, nous aimons retrouver cet état de bien-être, d’où la répétition de l’acte de manger sucré. Toutefois, aujourd’hui, pour guider nos choix au supermarché, cette préférence universelle pour les produits sucrés nous dessert plus qu’elle nous sert…

dépendance au sucre

- Enfin, et surtout, quand vous vous dites "attiré par le sucré", est-ce plus : vers ce type d'aliments ?

Ou encore vers ces derniers

Ou encore vers ceux-ci

Il y a fort à parier que vous préférez la 2ème catégorie d’aliments (et 3ème pour certains aussi), c’est à dire les produits pas uniquement sucrés mais finalement gras et sucrés ou gras et salés, en tout cas avec un point commun : leur forte densité énergétique (= très caloriques sous un petit volume). Là encore il s’agit d’un mécanisme de survie de l’espèce visant à stocker l’énergie à disposition pour faire face aux possibles famines, si fréquentes autrefois. Or désormais, dans notre société d’abondance, ce mécanisme primitif ne nous est plus vraiment utile, au contraire…

Très bien, me direz-vous, mais suis-je condamné physiologiquement à être attiré irrésistiblement vers ces produits, et à subir les conséquences d’une surconsommation : fatigue, prise de poids, envie d’en manger toujours plus, etc…?

Heureusement, non ! Certes, tout dépend de votre degré de dépendance, toutefois quelques petites astuces à mettre en oeuvre au quotidien devraient vous aider à mieux gérer vos envies de produits doudous.

 

Les questionnement

Tout d’abord, prenez quelques minutes pour écrire sur une feuille:

– Vos aliments doudous fétiches.

– Les raisons de leur consommation excessive : par habitude, par faim, par envie, pour calmer une tension, un stress ou autres.

– Les moments de la journée et avec qui votre consommation de produits fortement énergétiques s’effectue : en solitaire, avec votre conjoint, vos enfants, etc.

 

 

Suite à cette étape indispensable d’auto-diagnostique, attaquons-nous à vos aliments plaisir et à leurs raisons de consommation.

S’il s’agit de véritable faim, de réponse à une sensation de faiblesse, de grognements dans l’estomac, soit vos repas sont trop légers (soupe et yaourt par exemple), soit ils sont au contraire trop riches en aliments à index glycémique élevé induisant une forte sécrétion d’insuline, ce qui fait rentrer plus que nécessaire le sucre dans vos cellules, vous mettant dans un état d’hypoglycémie réactionnelle (= plus assez de sucre dans le sang quelques heures après un repas). La solution en ce cas : faire des repas plus complets, avec légumes, féculents, matières grasses et protéines en quantité suffisante.

S’il s’agit d’une envie alors que vous n’avez pas faim et que vous mangez en solitaire des aliments que vous ne mangez pas en société, c’est que, bien souvent, vous vous interdisez d’habitude ces aliments tabous car « ils ne sont pas bons pour la santé » et/ou « ils font grossir ». la stratégie en ce cas : ne pas s’interdire un aliment dont on a envie (sauf cas d’allergie, bien sûr). Car l’aliment banni sera dans votre esprit d’autant plus désirable qu’interdit ! Plusieurs solutions s’offrent à vous, à vous d’en choisir une…ou plusieurs selon les situations :

 

Mes conseils

– Substituez l’aliment incriminé par un équivalent moins calorique. Par exemple, vous craquez les grands bâtonnets type M. Remplacez les par des esquimaux tout simple, la différence calorique varie du simple au double. Ou encore, n’achetez plus de gâteaux au chocolat mais réalisez des pâtisseries à la maison en les allégeant : moins de beurre, moins de sucre et vous éviterez ainsi l’huile de palme et le sirop de glucose-fructose, ce qui sera bénéfique pour votre santé.

– Ritualisez la consommation de l’aliment défendu. Par exemple, vous adorez le 4/4 à la pâte à tartiner chocolat-noisette. Une véritable catastrophe, selon vous, pour votre tour de taille… En ce cas, planifiez votre parenthèse-douceur en réalisant une variante maison! Cuisinez vous-même votre 4/4 et juste après la cuisson, coupez de fines tranches individuelles et congelez-les. Ce sera moins tentant qu’un bon gâteau bien odorant placé à vue sur la table et embaumant toute votre cuisine! Si possible, faîtes de même pour tout aliment très tentant cuisiné en grosse quantité : portionnez en petite quantité individuelle, congelez !

Ensuite, lorsque vous préparez votre repas, n’oubliez pas de sortir une petite assiette colorée, d’y placer au centre une fine tranche de 4/4 que vous avez fait décongeler quelques minutes au four à micro-ondes, tartinez-la de pâte chocolatée light maison express (lait écrémé en poudre mixé + cacao maigre + édulcorant en poudre + arôme noisette), décorez votre assiette de quartiers de fruits frais de saison ou encore de billes de melon, de fruits rouges (là aussi, la solution du surgelé est très pratique et moins onéreuse que ces fruits frais chers même en saison). Puis prenez le temps de déguster votre collation, assis, à table (pas en surfant sur internet! Votre plaisir de dégustation serait bien moindre). Vous pouvez aussi remplacer le 4/4 par une petite crêpe maison, conseil de bretonne 🙂

Attaquons-nous aussi aux moments et aux personnes qui vous incitent volontairement ou involontaireent à la consommations de produits bien tentants.

Si vous mangez seul des aliments très énergétiques pour faire face à un stress ou à l’ennui, utilisez des techniques non alimentaires pour y faire face. Par exemple, appelez une amie, votre famille, faîtes un petit tour de quartier ou du lèche-vitrines, ou encore faîtes une activité manuelle, intellectuelle ou physique vous occupant l’esprit et les mains.

Si votre consommation de desserts et goûters sucrés est liée aux multiples tentations de votre entourage, rangez les biscuits et gâteaux de vos enfants et conjoints dans des placards qui ferment à clé idéalement et donnez la clé à votre conjoint. Peut-être extrême comme technique, mais elle fonctionne ! Et pour leur goûter quotidien, donnez-leur l’exemple : pourquoi pas une banane avec du chocolat fondu pour changer des biscuits ?

Aux repas entre amis, prenez une petite part de ce qui vous fait vraiment envie et refusez poliment ce qui ne vous tente pas vraiment. Une réponse choc qui passe toujours : « après le bon plat que tu as cuisiné, vraiment je n’ai plus faim, je vais juste prendre une bouchée de ton dessert pour goûter. Tu peux me donner la recette ?  » Vous êtes ainsi sûr de ne pas vexer la personne qui vous a invité.

Enfin, dernière astuce : utilisez (à bon escient !) les allégés en sucre et graisse. Ce sera le thème du prochain post : si certains produits sont tout à fait recommandables, d’autres allègent surtout votre portefeuille !

(1) M. Lenoir, F. Serre, L. Cantin, S.H. Ahmed. Intense sweetness surpasses cocaine reward, Plos One.

Ce site Web utilise des cookies pour vous garantir la meilleure expérience possible.